La thérapie du mal de maires : la tolérance zéro !

C’est l’affaiblissement du lien social et l’absence de réaction face au désordre qui favorisent le développement de la délinquance et l’irrespect croissant à l’égard de l’autorité publique en général et des maires en particulier.

Menaces, injures, dégradations, graffitis, dépôts sauvages, occupation de l’espace public, consommation et vente publique d’alcool ou de drogue, mendicité, rodéos sauvages, street-pooling (dernière invention à la mode qui consiste à ouvrir les bouches incendies pour les transformer en douches et jets d’eau), … provoquent un sentiment d’insécurité chez les riverains et d’impunité chez les voyous. Et dans ce royaume de l’incivilité généralisée, les petits rus font aussi les grandes rivières.

Les tags sur l’Arc de Triomphe en novembre dernier sont l’expression même d’un pays qui pâtit d’un laxisme de l’autorité de l’Etat depuis des années. Et il faut bien l’avouer, la classe politique sans exclusive, traine comme un boulet le lourd fardeau de cet attentisme qu’elle porte en bandoulière au fil du temps sans pouvoir ou sans vouloir y apporter les réponses concrètes d’une République digne de ce nom.

Les maires réduits à des prestataires de service

Dans nos villes, villages ou bourgs, qui est systématiquement mais injustement montré du doigt pour son incapacité à répondre efficacement et immédiatement à ces actes délictueux? Le maire bien sûr, coupable de tous les maux. En a-t-il seulement les moyens ? La réponse est dans la question. Le maire, officier de police judiciaire, oui ; délégataire de l’autorité de l’Etat, oui… Sur le papier. Pas sur le terrain.

Aujourd’hui notre fonction est bien plus celle d’un prestataire de services de l’Etat qu’un dépositaire de son autorité. Chaque année, les transferts de compétence de l’Etat vers les collectivités augmentent sans concertation, sans aucune correspondance avec les moyens nécessaires pour honorer ces nouvelles injonctions : traitement des cartes d’identité et des passeports, traitement des PACS (hier confiés au tribunal d’instance), collecte des données du recensement pour le compte de l’INSEE, etc… Sur la seule ville de Poissy, un surcoût total des décisions de l’Etat de 500.000 euros sur une seule année, compensations incluses. Les maires font face, avalent les couleuvres, malgré des conditions d’application et de qualité de travail des agents de plus en plus compliquées, mais avec ce souci de la bienveillance et de la gestion rigoureuse du service public. En rendant des budgets équilibrés systématiquement, très souvent sans augmenter la pression fiscale locale (malgré les dotations de l’Etat qui continuent de chuter) et sans baisser le niveau de service à la population. Parce que c’est ça être maire, un engagement sans limite, de l’enthousiasme avant toute chose, une fonction hors-norme, à plein temps, qui dépasse -et de loin- le tour des cadrans.

Le maire, dépositaire de l’autorité de l’Etat, une belle littérature.

Un exemple péremptoire dans ma commune. L’arrivée du Paris Saint-Germain sur le site de Poissy pour y construire son futur centre d’entrainement sur 74 hectares. En juin 2017, 16 caravanes de Rom y ont pris place illégalement. Je me suis déplacé avec le Sous-Préfet d’arrondissement en personne le soir même de leur arrivée. Nous avons respecté à la lettre nos devoirs (diagnostic social, sanitaire,..). Nous avons déposé plainte. Les Roms, passés de 30 à 80, ont été expulsés judiciairement et administrativement à l’automne, soit plus de 4 mois plus tard… en laissant le soin à l’autorité publique de libérer quelques centaines de tonnes d’immondices et de dépôts, et au contribuable de régler une facture d’environ 800.000 euros… Finalement les CRS étant pris par ailleurs, ce sont les policiers du commissariat et les policiers municipaux de la ville qui se sont chargés de l’expulsion.  Le maire a une réactivité et une expertise avec ses équipes de terrain que l’Etat pourrait officiellement lui confier. Dans un acte gagnant/gagnant de décentralisation devenu indispensable.

La théorie de la vitre brisée.

Cette future étape pourrait s’inscrire dans un plan national de prévention des risques urbains : lutte contre la drogue, démantèlement des trafics d’armes, lutte contre la délinquance juvénile, traitement de la violence familiale, atteintes à la qualité de vie, lutte contre l’incivisme (dépôts sauvages, rodéos motos, street-pooling, saleté, déjections canines, nuisances sonores…). En dehors de la lutte contre la drogue ou les trafics d’armes, toutes ces thématiques pourraient être placées sous la responsabilité directe et exclusive des maires.

Mais il nous faut aussi un traitement de cheval. La seule thérapie qui vaille pour soigner ce « mal des maires » sans précédent. La Tolérance Zéro. C’est ce que nous attendons. Dans les actes, pas seulement dans les mots. Sur le modèle de la « théorie de la vitre brisée » que la ville de New-York a mise en pratique sous l’ère Rudolph Giuliani, maire de New-York (1994-2001). Quand une vitre brisée dans un immeuble n’est pas réparée, toutes les fenêtres seront bientôt cassées. Une fenêtre non réparée envoie le signal que personne n’a rien à faire de la situation et que casser plus de fenêtres ne coûte rien. Entre 1994 et 2000, la criminalité a baissé de 57% à New-York. L’incivisme avec.  A chaque incivilité, une sanction. A chaque menace, à chaque injure, une amende. Dissuasive. Sans aucun d’état d’âme. On est très loin ici des 68 euros forfaitaires de verbalisation pour un dépôt sauvage sur le domaine public. Et encore, faut-il que l’auteur soit pris en flagrant délit ! Ce n’est pas le cas tous les jours.

Jean-Mathieu Michel y a laissé sa vie et 36 années d’engagement à l’endroit de ceux qu’il servait. Avec son départ, ce sont 35.000 écharpes qui ont perdu de leur éclat. Entre infinie tristesse et infinie colère. Le mal de maires…

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