LE RSA, un CDD de survie, pas un CDI à vie

Tribune parue dans le journal la Tribune le 11 mai 2023

A sa création en 2008, l’idée était louable : lutter contre la grande pauvreté et aider à l’insertion sociale des bénéficiaires. 15 ans plus tard, l’échec du RSA est patent. « A défaut d’un engagement fort de l’ensemble des acteurs, le RSA risque d’évoluer vers une simple allocation de survie, marquant l’échec des ambitions affichées lors de sa création » (cour des comptes 2022). Il est venu le temps des droits et des devoirs.

Les chiffres sont têtus. La grande pauvreté croît chez les jeunes de 25 ans et plus : 1,3 million de bénéficiaires du RSA en 2008 et presque 2 millions en 2022. Sans compter les 30% qui pourraient être éligible à cette allocation mais qui ne le savent pas. Si la tendance de cette augmentation de 53% s’est atténuée après le Covid, elle ne saurait gommer la réalité du quotidien : « Une atteinte insuffisante du public cible, laissant subsister des situations de précarité et d’exclusion ».

Le deuxième pilier du « grand frère » du RMI n’est pas plus réjouissant. La promesse d’encourager le retour à une activité professionnelle a fondu comme neige au soleil.  7 ans après son entrée au RSA, seul un tiers des bénéficiaires en est sorti, et seul un tiers est en emploi stable.

A cela trois raisons majeures -sans généraliser le propos, avec discernement j’insiste- : une allocation entre 600 et 1300 euros sans réelle contrepartie, ni formalisée, ni sérieusement contrôlée ; une faiblesse de l’accompagnement ; un accès difficile à l’emploi qui compromet la promesse centrale du dispositif de faire des revenus du travail le principal rempart contre la pauvreté.

Comment en vouloir à ces Français de classe moyenne qui nous récitent chaque jour le poème sur « l’intérêt de rester chez soi plutôt que d’aller travailler » ? On ne peut leur donner tort. Aujourd’hui encore, un bénéficiaire du RSA qui peut bénéficier des réductions de taxes, de la réduction sociale téléphonique, des aides locales ou de l’allocations logement … cumule un total de subsides qui se rapproche ou peut dépasser le salaire d’un travailleur au SMIC sur le terrain. L’incitation au travail n’y est pas.

Comment en vouloir à ces Français de classe moyenne qui nous récitent chaque jour le poème sur « l’intérêt de rester chez soi plutôt que d’aller travailler ». On ne peut leur donner tort. Aujourd’hui encore, un bénéficiaire du RSA et de l’allocation retour à l’emploi gagne d’avantage en restant chez soi qu’un travailleur au SMIC sur le terrain (1489 euros contre 1329 euros).

Que dire de la fraude qui en découle. Le RSA est le dispositif social le plus fraudé. Entre les omissions frauduleuses et les fausses déclarations, le montant est estimé à 350 millions d’euros.

Il est venu le temps du contrat gagnant/gagnant, le temps de la réciprocité entre les droits et les devoirs. Ici comme ailleurs. C’est le sens des mesures annoncées. Une contrepartie de 15 à 20h par mois autour de formations professionnelles, accompagnement vers un logement, travail dans des collectivités…. Avec un meilleur accompagnement et un contrôle systématisé, sanctions à la clé pour les contrevenants : de la suspension à la suppression des indemnités (là encore avec discernement).

La mise sous respiration artificielle de 15 milliards d’euros par l’Etat chaque année -coût du RSA- n’a malheureusement jamais débouché sur un meilleur bulletin de santé de ceux qui appliquaient ou feignaient d’appliquer le traitement. Mais elle continue de creuser son déficit…

Le R de Revenu est le fruit d’un travail, le A de Active est le contraire de passive. Le RSA doit rester un CDD de survie et non un CDI à vie. Elle est là la justice et la justesse sociale que notre pays doit désormais insuffler.

De l’urgence de sacraliser l’autorité de l’Etat !

En ce vendredi 23 avril 2021, la France se lève la tête dans les étoiles avec l’extraordinaire Thomas Pesquet et sa conquête spatiale. Cap Canavéral, décollage, capsule, station internationale, le rêve absolu. Fierté mondiale. Mais quelques heures plus tard, début d’après-midi, retour sur terre non contrôlé pour les Français. Innommable. Torpeur. Sidération. Stéphanie, fonctionnaire de police de 49 ans, mère de deux enfants, est égorgée dans son commissariat de Rambouillet, paisible et magnifique ville du Sud-Yvelines.

Acte terroriste islamique. Encore un. Mois après mois, année après année, la liste des victimes s’allonge, se ramasse à la pelle, comme des feuilles mortes. La France, patrie des droits de l’homme, terre des libertés, est abimée. Nice, Saint-Etienne-du-Rouvray, Magnanville, Conflans, … notre pays est cabossé. Comment restaurer l’autorité de l’Etat qui fond comme neige au soleil, comment la légitimer, comment la ré-identifier avant de la stabiliser ?

Ne comptons pas sur les partis politiques de quelque bord que ce soit pour s’accorder à en dessiner les contours. Incapables les uns les autres de partager en de telles circonstances une concorde nationale pour soutenir nos forces de police comme un seul Homme. La Gauche idéologique est muette comme une carpe, les Verts font l’autruche en poursuivant leurs investigations pour remplacer les voitures de police par des vélos, la Droite fait l’anguille en réclamant plus de moyens, feignant de rappeler qu’elle a supprimé dix mille policiers lorsqu’elle était aux affaires. Quant à la France Insoumise et l’extrême droite, ces partis qui ne sont jamais aussi proches l’un de l’autre qu’en temps de crise, ils rendent leur devoir sur table : le concours Lépine du « Yaka Fokon ».

C’est pourtant par l’union sacrée de tous les Français que nous ré-institutionnaliserons l’autorité de l’Etat.

Devoir de mémoire. L’article 3 de la Déclaration des Droits de l’Homme de 1789: tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne. Oui, la sécurité est la première de nos libertés. Nul ne saurait l’oublier. Qui l’incarne ? Nos policiers nationaux et municipaux, nos gendarmes, nos militaires. Nous avons non seulement le devoir de respecter mais également de sacraliser les dépositaires de l’autorité publique, comme elle peut exister dans les pays anglo-saxon. « Don’t touch ! ». Ce n’est pourtant pas ou plus le cas.

Laxisme et impunité

A l’issue du procès des policiers brûlés vifs à Viry-Châtillon, le verdict rendu la semaine passée a de quoi étonner. 8 condamnés, 5 acquittés! Quel message pour les victimes ? Quel message pour les coupables ? Quel message pour les Français nourris dès le berceau au biberon des droits et des devoirs ? Osciller entre le laxisme et l’impunité n’est ni l’alpha et l’oméga de tout citoyen français qui se respecte. Remettons de l’ordre dans notre curseur législatif et judiciaire. Un policier qui interpelle un jeune qui lui flanque un cocktail molotov à la figure ne peut comprendre que ce même mineur regagne son domicile moins de 24H plus tard avec un simple rappel à la loi. Nous non plus! Rares sont les comparutions immédiates dans pareilles situations.

Au quotidien, nos forces de sécurité protègent nos vies, au détriment des leurs. Il n’est pas inutile de le rappeler à nos compatriotes. L’immense majorité de nos policiers sont des professionnels exemplaires. Condamnons sans état d’âme et signalons les quelques brebis galeuses qui se sont perdues dans l’institution. Mais comment comprendre qu’une télévision publique, en prime time, diffuse un reportage complet à charge à des fins d’humilier la police ? Cette propagande anti-flics gratuite ne grandit pas ses instigateurs, fragilise la corporation et affaiblit de fait l’autorité de l’Etat.

Union sacrée

Voilà pourquoi, au nom des valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité, j’appelle à l’union de la France, rempart infranchissable face à l’intolérance et la haine, pour que l’histoire ne se reproduise pas.

Cette même histoire qui n’a de sens que si les générations futures se rappellent que l’Horreur et la Haine commencent avec le même H majuscule que l’Histoire ! 

Cette Horreur et cette Haine que nous devons continuer à combattre au quotidien comme nous l’a rappelé le lâche assassinat de Stéphanie. Dans l’enceinte d’un des emblèmes de notre République.

Un de ces lieux symboliques, cibles de ceux qui en veulent à nos traditions et à nos institutions !

Car ils incarnent tout ce que nous ne cesserons de défendre.

L’ordre républicain visé à travers ce commissariat

La liberté de parole attaquée dans les locaux de Charlie

Le message des Lumières attaqué à travers Samuel Paty

La liberté de culte et la laïcité à la française ciblées tant de fois ces dernières années.

Ecoles, commissariats, armées, lieux de cultes, élus … les symboles sont forts !

Mais notre détermination à lutter contre ceux qui veulent changer notre mode de vie n’est pas moins forte.

En ce jour de commémoration nationale sur la Déportation, j’appelle une nouvelle fois à l’union sacrée derrière nos forces de sécurité. Faire Nation ne doit pas être une vaine formule. Mettons nos actes en face de nos mots.

Derrière tous les policiers de France, toutes les fonctionnaires de police qui veillent sur notre sécurité.

Pour défendre notre République,

Pour ne rien céder à l’isolement et au communautarisme consciencieusement entretenus par certaines idéologies radicales, prêtes à nous diviser et à nous priver de notre liberté.

Pour faire en sorte que nos enfants et nos petits-enfants continuent de connaître la paix que nous avons la chance de vivre depuis 76 ans.

Dans ses cours au Collège de France, Émile Durkheim, père fondateur de la sociologie moderne (1858-1917) essaimait : « Plus l’État est fort, plus il libère l’individu ». Notre histoire l’a sans cesse démontré depuis…

La thérapie du mal de maires : la tolérance zéro !

C’est l’affaiblissement du lien social et l’absence de réaction face au désordre qui favorisent le développement de la délinquance et l’irrespect croissant à l’égard de l’autorité publique en général et des maires en particulier.

Menaces, injures, dégradations, graffitis, dépôts sauvages, occupation de l’espace public, consommation et vente publique d’alcool ou de drogue, mendicité, rodéos sauvages, street-pooling (dernière invention à la mode qui consiste à ouvrir les bouches incendies pour les transformer en douches et jets d’eau), … provoquent un sentiment d’insécurité chez les riverains et d’impunité chez les voyous. Et dans ce royaume de l’incivilité généralisée, les petits rus font aussi les grandes rivières.

Les tags sur l’Arc de Triomphe en novembre dernier sont l’expression même d’un pays qui pâtit d’un laxisme de l’autorité de l’Etat depuis des années. Et il faut bien l’avouer, la classe politique sans exclusive, traine comme un boulet le lourd fardeau de cet attentisme qu’elle porte en bandoulière au fil du temps sans pouvoir ou sans vouloir y apporter les réponses concrètes d’une République digne de ce nom.

Les maires réduits à des prestataires de service

Dans nos villes, villages ou bourgs, qui est systématiquement mais injustement montré du doigt pour son incapacité à répondre efficacement et immédiatement à ces actes délictueux? Le maire bien sûr, coupable de tous les maux. En a-t-il seulement les moyens ? La réponse est dans la question. Le maire, officier de police judiciaire, oui ; délégataire de l’autorité de l’Etat, oui… Sur le papier. Pas sur le terrain.

Aujourd’hui notre fonction est bien plus celle d’un prestataire de services de l’Etat qu’un dépositaire de son autorité. Chaque année, les transferts de compétence de l’Etat vers les collectivités augmentent sans concertation, sans aucune correspondance avec les moyens nécessaires pour honorer ces nouvelles injonctions : traitement des cartes d’identité et des passeports, traitement des PACS (hier confiés au tribunal d’instance), collecte des données du recensement pour le compte de l’INSEE, etc… Sur la seule ville de Poissy, un surcoût total des décisions de l’Etat de 500.000 euros sur une seule année, compensations incluses. Les maires font face, avalent les couleuvres, malgré des conditions d’application et de qualité de travail des agents de plus en plus compliquées, mais avec ce souci de la bienveillance et de la gestion rigoureuse du service public. En rendant des budgets équilibrés systématiquement, très souvent sans augmenter la pression fiscale locale (malgré les dotations de l’Etat qui continuent de chuter) et sans baisser le niveau de service à la population. Parce que c’est ça être maire, un engagement sans limite, de l’enthousiasme avant toute chose, une fonction hors-norme, à plein temps, qui dépasse -et de loin- le tour des cadrans.

Le maire, dépositaire de l’autorité de l’Etat, une belle littérature.

Un exemple péremptoire dans ma commune. L’arrivée du Paris Saint-Germain sur le site de Poissy pour y construire son futur centre d’entrainement sur 74 hectares. En juin 2017, 16 caravanes de Rom y ont pris place illégalement. Je me suis déplacé avec le Sous-Préfet d’arrondissement en personne le soir même de leur arrivée. Nous avons respecté à la lettre nos devoirs (diagnostic social, sanitaire,..). Nous avons déposé plainte. Les Roms, passés de 30 à 80, ont été expulsés judiciairement et administrativement à l’automne, soit plus de 4 mois plus tard… en laissant le soin à l’autorité publique de libérer quelques centaines de tonnes d’immondices et de dépôts, et au contribuable de régler une facture d’environ 800.000 euros… Finalement les CRS étant pris par ailleurs, ce sont les policiers du commissariat et les policiers municipaux de la ville qui se sont chargés de l’expulsion.  Le maire a une réactivité et une expertise avec ses équipes de terrain que l’Etat pourrait officiellement lui confier. Dans un acte gagnant/gagnant de décentralisation devenu indispensable.

La théorie de la vitre brisée.

Cette future étape pourrait s’inscrire dans un plan national de prévention des risques urbains : lutte contre la drogue, démantèlement des trafics d’armes, lutte contre la délinquance juvénile, traitement de la violence familiale, atteintes à la qualité de vie, lutte contre l’incivisme (dépôts sauvages, rodéos motos, street-pooling, saleté, déjections canines, nuisances sonores…). En dehors de la lutte contre la drogue ou les trafics d’armes, toutes ces thématiques pourraient être placées sous la responsabilité directe et exclusive des maires.

Mais il nous faut aussi un traitement de cheval. La seule thérapie qui vaille pour soigner ce « mal des maires » sans précédent. La Tolérance Zéro. C’est ce que nous attendons. Dans les actes, pas seulement dans les mots. Sur le modèle de la « théorie de la vitre brisée » que la ville de New-York a mise en pratique sous l’ère Rudolph Giuliani, maire de New-York (1994-2001). Quand une vitre brisée dans un immeuble n’est pas réparée, toutes les fenêtres seront bientôt cassées. Une fenêtre non réparée envoie le signal que personne n’a rien à faire de la situation et que casser plus de fenêtres ne coûte rien. Entre 1994 et 2000, la criminalité a baissé de 57% à New-York. L’incivisme avec.  A chaque incivilité, une sanction. A chaque menace, à chaque injure, une amende. Dissuasive. Sans aucun d’état d’âme. On est très loin ici des 68 euros forfaitaires de verbalisation pour un dépôt sauvage sur le domaine public. Et encore, faut-il que l’auteur soit pris en flagrant délit ! Ce n’est pas le cas tous les jours.

Jean-Mathieu Michel y a laissé sa vie et 36 années d’engagement à l’endroit de ceux qu’il servait. Avec son départ, ce sont 35.000 écharpes qui ont perdu de leur éclat. Entre infinie tristesse et infinie colère. Le mal de maires…